(C) Uwe Hentschel

Stephen Senn est directeur du Centre de Compétences de la Méthodologie et des Statistiques du Luxembourg Institute of Health

Lorsque des études cliniques mènent à des valeurs extrêmes, les mesures effectuées ultérieurement se situent généralement plus proches de la moyenne. Il s'agit là d'un phénomène statistique sous-estimé.

Les simulateurs de croissance, qui prospèrent sur le net, sont des outils très appréciés. Il suffit d'indiquer la taille de la mère, du père et de compléter le sexe de l'enfant pour découvrir la taille adulte probable de ce dernier. Si deux parents exceptionnellement grands ont un fils, alors celui-ci les dépassera ; s'ils ont une fille, la taille de cette dernière dépendra de l'écart entre les deux parents, mais elle sera au moins plus grande que la mère. Dans de nombreux cas, cette analyse se révèle exacte. Néanmoins, si cela était la règle, nous serions tous entourés de géants. Comme on peut le constater, ce n'est justement pas le cas et c'est ce que nous appelons la régression vers la moyenne (regression to the mean).

La régression vers la moyenne, ou le retour à la moyenne, est un concept issu du domaine des statistiques. Ce phénomène désigne le fait que toute valeur particulièrement élevée est suivie par une valeur plus proche de la moyenne. Dans le cas de l'exemple évoqué, ce processus fait en sorte que les enfants de parents extrêmement grands aient, d'un point de vue statistique, une taille plus proche de la moyenne que celle de leurs parents. Et inversement : les parents dont les enfants ont une taille élevée par rapport à la moyenne présentent une taille plus proche de celle-ci que leur descendance.

Un phénomène souvent ignoré dans les études cliniques

« Ce phénomène est difficile à comprendre pourtant, il existe une véritable explication mathématique », affirme Stephen Senn, directeur du Centre de Compétences de la Méthodologie et des Statistiques du Luxembourg Institute of Health (LIH). Stephen Senn s'est déjà consacré à plusieurs reprises au retour à la moyenne dans le cadre de ses travaux scientifiques. Il est donc conscient de ce phénomène mais aussi du fait qu'il est souvent mis à l'écart dans les études cliniques ; avec pour conséquence la déformation des effets de traitement.

Exemple : un médicament contre la tension artérielle doit être testé dans le cadre d'une étude. La tension va d'abord être prise sur un grand nombre de personnes afin de choisir les participants dont la tension est élevée et qui sont donc concernés par le test.  Le médicament sera ensuite administré à ces personnes. Une nouvelle mesure de la tension sera effectuée ultérieurement. Si lors de ce second examen la tension est descendue de manière significative chez la plupart des participants alors, on peut en conclure que le médicament agit.

Une situation de départ inexacte a inévitablement des conséquences

Pour Stephen Senn, le problème se situe dès le niveau de la sélection des participants. « Une tension artérielle trop élevée peut avoir diverses causes », explique-t-il. Elle peut être due à un facteur génétique ou au régime alimentaire, mais aussi à la forme physique du jour ou encore à une erreur de mesure, autrement dit à un brassard de tensiomètre mal positionné. Cette situation de départ inexacte débouche obligatoirement sur des résultats différents lors d'une seconde prise de mesure. Conformément au retour à la moyenne, on obtient lors de la première mesure une multitude de valeurs extrêmes, qui sont ensuite suivies, lors de la seconde mesure, par des valeurs se rapprochant de la fourchette normale.

Pour savoir si le médicament fonctionne bien, il faudrait donc répartir les personnes selon la loi du hasard dans un groupe test et un groupe témoin, explique le professeur en statistiques. Si la baisse de la tension artérielle moyenne constatée dans le groupe d'étude est nettement plus importante que celle enregistrée dans le groupe témoin, alors l'effet du médicament est réellement attesté.

Auteur: Uwe Hentschel

Photo: Uwe Hentschel

 

 

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